12 octobre 2008

Le Clézio, un Nobel insulaire


La France est à l'honneur, avec 2 prix Nobel cette année. On s'étonne évidemment du quart de siècle nécessaire à l'Académie Suédoise pour se décider à attribuer celui de Médecine à Luc Montagnier et Françoise Barré-Sinoussi, qui découvrirent le virus du SIDA... au début des années 80 ! On peut également s'étonner de l'hommage inattendu rendu à J.M.G. Le Clezio, si discret, si classique, surtout qu'il est qualifié à cette occasion par le jury « d'écrivain de la rupture ». Ce qui a plu c'est peut-être cette aura étrange qui nimbe le personnage et en fait « un cas », en quelque sorte...
Je ne connais Le Clézio que par un petit ouvrage paru à la fin des années 80, Voyage à Rodrigues. Il y raconte à peu près la même histoire que dans son roman Le Chercheur d'Or, à savoir celle de son grand-père, juge à Port-Louis de l'Ile Maurice, ruiné, exproprié de sa maison de famille et parti, seul, dans l'espoir de « se refaire », vers Rodrigues, à la recherche du mythique trésor du pirate Olivier Levasseur dit « la Buse ».
Le Clézio raconte en réalité sa propre équipée vers ce petit bout de terre perdu dans l'Océan Indien, quelques soixante ans après son grand-père.
Qu'est-il allé y faire, il ne le sait lui-même : « Ai-je vraiment cherché quelque chose ? ».
Il faut bien dire qu'on s'en doute dès le début : pas plus que son aïeul qui s'y est éreinté durant une bonne vingtaine d'années, il ne trouvera le fameux butin.
Par moment surgit une sorte d'éclair : « Je vois ce que je suis venu chercher réellement à Rodrigues : les traces visibles de cet homme, restées apparentes par le miracle de la solitude... ». Mais le lecteur reste sur sa faim car en définitive il ne s'agit que de « coups sur les parois, vers le fond du ravin, qui ont ouvert des blessures dans le schiste, détachant les blocs de lave ».
Peut-être alors l'illusion étrange, à travers cette aventure vaine, « de ne faire qu'un » avec son grand-père, « comme deux hommes qui auraient la même ombre ». Mais, de son propre aveu, il s'agit d'un rêve et, « Comme tous les rêves, il s'achève sur rien... »
Au bout du compte, on est donc un tantinet frustré par ce récit erratique, écrit dans un style limpide mais un peu répétitif. La personnalité sûrement originale du grand-père ne ressort pas vraiment : il est comme une silhouette ahanant silencieusement sur fond de cailloux et de basalte. Quant au paysage, il inspire manifestement des sentiments contradictoires. Tantôt il est « d'une pureté extraordinaire, minéral, métallique, avec les arbres rares d'un vert profond, debout au-dessus de leurs flaques d'ombre, et les arbustes aux feuilles piquantes, palmiers nains, aloés, cactus, d'un vert plus aigu, pleins de force et de lumière », tantôt c'est un « paysage de pierre noire, où blesse la lumière et brûle le vent. Paysage d'éternel refus... », une « Terre brûlée, noire, dure qui refuse l'homme. Terre indifférente à la vie, rocs, montagnes, sable, poussières de lave ».

Le Clézio est un personnage atypique. Sûrement s'agit-il d'un authentique écrivain, mais la substance de son oeuvre paraît quelque peu évanescente, nébuleuse. Et son style est si fluide et lointain, qu'on se demande si le nom même de cet auteur évoque quelque chose de précis à quelqu'un. Une sorte d'île mystérieuse, peu accessible, sans doute...

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